L’expatriation n’est pas une destination…
Il y a quelques mois, je passais devant l’office de tourisme à Bordeaux, fraîchement ré-ouvert. Et dans la vitrine, le slogan d’un tee-shirt a attiré mon regard.
“Bordeaux is not a destination.
It’s a way of life.”
Cette phrase m’a fait sourire immédiatement tant elle capture l’essence même de l’expatriation !
J’adore les phrases, a priori ordinaires, comme celle-ci mais qui provoquent en soi des moments de clarté soudaine. J’ai continué à marcher en me disant « Mais c’est exactement ça ! »
Je suis une expatriée de longue date. J’ai quitté ma ville natale, Cardiff, il y 27 ans maintenant. Et si j’ai appris quelque chose en grandissant en dehors des frontières de mon pays, c’est justement ça :
L’expatriation n’est pas une destination.
C’est un mode de vie
Mais c’est aussi là que les choses se compliquent…. Nombreux sont ceux qui partent. Souvent à la recherche de choses diverses et variées. Mais que trouve-t-on exactement à s’expatrier ?
Ma réponse à cette question serait : un mode de vie véritablement passionnant qui consiste à découvrir l’Autre sous tous ses aspects, à s’adapter et se redéfinir, et à rechercher un semblant d’équilibre dans tout ça.
Vaste programme !
S’expatrier c’est aller à la découverte d’un milliard de choses à la fois.
Personnellement je l’ai vécu et le vis encore comme une expérience à la fois extraordinaire, étourdissante et il faut le dire… parfois déroutante ! Ce serait trop simple….
En mettant un pied à l’étranger, nous entrons dans une culture, une langue, une histoire mais aussi dans des traditions, des usages, des codes vestimentaires, des habitudes alimentaires, un climat, une géographie, des valeurs, une lumière, des odeurs, un cadre social, un rapport au temps, etc… la liste est longue !
On n’imagine pas toujours l’impact de ces différences surtout lorsque le pays visité est un pays voisin dont on se sent proche. En réalité, TOUT est nouveau, TOUT est rencontre, TOUT est follement, merveilleusement, étrangement AUTRE. Et c’est là, l’incroyable richesse de l’expérience : On découvre la possibilité de vivre autrement, de penser autrement et d’envisager sa vie autrement.
Face à tant de dépaysement survient l’effort nécessaire voire quasi vital de l’adaptation.
S’adapter devient une gymnastique quotidienne. Certaines situations sont plus faciles ou superficielles que d’autres bien évidemment et certaines demanderont un effort plus grand. Chaque pays aura ses points forts et ses points faibles selon les sensibilités. Cependant, le plus intéressant dans cette adaptation, c’est le questionnement intérieur qu’elle suscite en chacun de nous. S’expatrier c’est aussi confronter en permanence tout ce qui nous semblait acquis, évident, comme allant de soi, à la réalité de l’Autre. A mon sens, c’est cela qui forge l’ouverture d’esprit.
L’adaptation est un processus de longue haleine au cours duquel les lignes et les contours de notre réalité se mêlent à ceux de l’Autre et se redessinent différemment. Chaque expatrié aura sa palette de couleurs unique en fonction de ses perceptions. Nombreux sont ceux qui le disent, on n’est plus jamais vraiment le même après une expatriation et c’est d’autant plus vrai si l’on s’installe définitivement à l’étranger.
C’est à ce moment précis que le besoin d’équilibre et de synthèse surgit.
Car on peut vite se sentir à la fois happé, bousculé et enivré par d’autres styles de vie et ne plus savoir très bien où l’on se situe par rapport à tout cela. Venir d’un monde et vivre dans un autre crée des tiraillements inévitables faits de manques, d’envies, de nostalgie, etc…. Aussi s’adapter en permanence peut devenir pesant. Il faut savoir se préserver et ralentir ce processus de découverte et d’adaptation qui se répète à l’infini.
Trouver cet entre-deux (ou plus selon que l’on soit un simple globe-trotteur ou un serial globe-hopper) est essentiel à mon avis pour trouver sa place. Et il faut nourrir toutes les parties de son identité. Pour ma part, j’ai ma partie britannique et ma partie française. Vivant en France, rester en contact avec la partie française de moi est chose facile. Mon challenge est d’investir ma partie britannique, ce que je fais en côtoyant d’autres Britanniques, en m’offrant un brunch, en regardant Downton Abbey en boucle, en sirotant du thé etc…